Joal de Senghor
Dans Joal, extrait du recueil Chants d’ombres, Léopold Sédar Senghor partage les souvenirs de son Sénégal natal, par le biais de l’écriture poétique. Il présente ainsi la dualité qui le caractérise en tant qu’Africain ayant fait ses études en Europe, où il intégrera l’Académie Française. Cette création particulière dans un climat colonialiste se retrouve dans ses écrits, puisque dès le titre le poème écrit en français puise son inspiration dans sa ville natale : Joal.
En quoi la poésie permet-elle ici à Senghor d’affirmer son déchirement entre deux mondes, Europe occidentale et Afrique, auxquels il appartient ? (…)
Poème:
Joal !
Je me rappelle.
Je me rappelle les signares à l’ombre verte des vérandas
Les signares aux yeux surréels comme un clair de lune sur la grève.
Je me rappelle les fastes du Couchant
Où Koumba N´Dofène voulait faire tailler son manteau royal.
Je me rappelle les festins funèbres fumant du sang des troupeaux égorgés
Du bruit des querelles, des rhapsodies des griots.
Je me rappelle les voix païennes rythmant le Tantum Ergo
Et les processions et les palmes et les arcs de triomphe.
Je me rappelle la danse des filles nubiles
Les choeurs de lutte – oh ! la danse finale des jeunes hommes, buste
Penché élancé, et le pur cri d´amour des femmes – Kor Siga !
Je me rappelle, je me rappelle…
Ma tête rythmant
Quelle marche lasse le long des jours d´Europe où parfois
Apparaît un jazz orphelin qui sanglote, sanglote, sanglote.
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